Nous avons eu la chance récemment d’essayer 2 modèles Ford complètement différents. Dans un coin, portant un costume Argent magnétique, le camion hors route F-150 Raptor digne des courses du Baja. Dans l’autre coin, vêtue d’un Bleu Nitreux, la sportive Focus RS à hayon inspirée des rallyes et conçue pour la piste. L’arène? Rien de moins que le complexe Mécaglisse au nord de Montréal, près de l'Esterel.
Vous avez déjà pu lire notre essai du Raptor (sinon, cliquez sur le lien ci-dessus), alors c’est maintenant le temps de vous parler de notre séance de pilotage endiablée sur la neige tapée du circuit routier de Mécaglisse avec la RS. Je dois vous dire avant d’aller plus loin que nous n’avons pas eu accès au circuit en entier, car les pneus à clous de nos modèles d’essai auraient endommagé certaines parties recouvertes d’une fine couche seulement.
Cela dit, il est quand même facile d’apprécier une voiture comme la Ford Focus RS. Avec 350 chevaux et 350 livres-pied de couple, sa performance se fait sentir dès qu’on enfonce l’accélérateur. De plus, grâce à son rouage intégral qui répartit le couple activement et à son mode de dérapage, on peut sentir son agilité de bolide de course dès qu’on tourne le volant.
Des lettres célèbres
Les connaisseurs savent que les lettres RS signifient « Rallye Sport » et qu’elles désignent des voitures Ford bien spéciales, comme les légendaires Escort RS1600, RS200 Group B Rally et Escort RS AWD. C’est toute une lignée, ça! La nouvelle Focus RS nous arrive avec ce puissant bagage génétique et un gros travail de concertation entre les divisions américaine et européenne de Ford.
Pour nous les Canadiens, qui n’avions pas accès aux générations précédentes, cette bombe nous fait cadeau à l’achat d’une grande puissance, de sièges Recaro de série, d’une traction intégrale ainsi que d’un ensemble de pneus d’été de performance et de pneus d’hiver (les versions américaines n’ont que des pneus d’été). Clairement, Ford positionne la Focus RS comme une voiture sport pour toutes les saisons.
Alors, comment se conduit-elle en hiver? C’est ce que nous allions voir…
De quoi vraiment s’amuser dans la neige
Le circuit nous a permis de tester la RS dans différentes situations, par exemple de longs virages rapides, des épingles, un slalom et quelques enchaînements gauche-droite-gauche sur une surface ondulée. Des instructeurs nous accompagnaient dans le siège du passager, mais au lieu de refroidir nos ardeurs au volant, ils nous ont plutôt incités à pousser encore plus à fond. Après tout, ce n’était pas de simples professeurs de conduite, mais bien des pilotes chevronnés ayant couru en Amérique du Nord et en Europe à bord de monoplaces et de bolides GT spécialement modifiés.
Au début, nous y sommes allés avec modération, question de nous habituer à l’adhérence des pneus à clous Michelin Pilot Alpine. Or, nous avons vite constaté qu’ils sont très généreux à ce niveau. Encouragés par nos instructeurs, nous avons ouvert la machine davantage, confiants que même si la Focus RS se mettait à faire du chasse-neige, un bon coup de pédale ferait sortir le derrière et nous ramènerait vers la sortie du virage en un rien de temps. Le slalom est devenu de plus en plus amusant et vous auriez dû voir les pneus à clous mordre la neige et la recracher vers l’arrière en gros nuages. Que de plaisir!
Mais ça, ce n’était rien comparé aux longs virages inclinés. Ici, les lois de la physique font en sorte que la voiture perd un peu de traction et de contact avec le sol — des conditions idéales pour faire valser le train arrière et effectuer des dérapages contrôlés. Nous avons même tenté un ou deux virages en pendule (« Scandinavian flick ») question de vraiment mettre de la pression sur le châssis. La Ford Focus RS nous inspirait tellement confiance que nous avions l’impression d’être des pilotes du Championnat du monde des rallyes au volant. Éventuellement, nous avons réussi à compléter tout un long virage en dérapant.
Le rouage intégral ici employé peut transmettre 70 % du couple du moteur aux roues arrière et de là la totalité à la roue gauche ou droite afin de mieux tourner dans le virage. Le système analyse la route 100 fois par seconde et on peut vraiment sentir la puissance change de côté. Plus nous progressions avec la voiture et nos techniques, plus nous tentions des angles de dérapage difficiles, mais la Focus RS nous sortait du pétrin chaque fois. Même en activant le mode de dérapage, qui minimise l’intervention des aides électroniques, elle s’est montrée totalement docile.
L’habitacle modifié de cette version facilite également la conduite agressive. Les sièges Recaro aux larges appuis latéraux nous tiennent fermement en place dans les courbes et la direction plus sensible ne nous oblige pas à travailler aussi fort avec le volant. J’aimerais juste que ce dernier ait un plus petit diamètre et qu’il soit plus incliné vers le conducteur, car en reculant le siège pour accommoder mon grand gabarit, je devais le tenir un peu à bout de bras, même en dépit de sa fonction inclinable et télescopique.
C’est une voiture pour la route, rappelons-le
La conduite en piste est bien amusante, mais combien de propriétaires de Ford Focus RS vont vraiment en profiter? Pas beaucoup. En conséquence, il faut que la voiture sache aussi se débrouiller sur la route. À quel point ses différentes modifications affectent-elles son comportement routier?
Ça dépend. Oui, la pédale d’embrayage est un peu plus lourde et la direction plus nerveuse peut nous surprendre (ainsi que nos passagers) si on ne s’en attend pas. Ajoutez à cela une suspension plus ferme et vous avez de quoi vous fatiguer à la conduire. Bonne nouvelle : il est facile d’ajuster la fermeté des amortisseurs (2 niveaux) en appuyant sur un bouton à l’extrémité de la tige de commande de gauche, peu importe le mode de conduite sélectionné.
Dans l’ensemble, toutefois, on obtient exactement le genre de voiture pour lequel on paie le gros prix, c’est-à-dire une Focus phénoménale qui peut non seulement attaquer n’importe quelle route secondaire avec férocité, mais aussi servir pour le magasinage et le camping grâce à son derrière à hayon (notez que le volume de chargement dans la RS est un peu réduit par la présence d’un différentiel arrière).
Et que dire du look? Avec son gros aileron et ses parechocs d’allure plus agressive, elle a vraiment de la gueule. La calandre, en particulier, arbore un joli motif alvéolaire au lieu du grillage de la Focus ST. Par ailleurs, les étriers de freins peints en bleu se font bien voir à travers les jantes fumées qui accompagnent les pneus d’été de série. Enfin, n’oublions pas le son d’échappement, qui se laisse écouter pratiquement n’importe quand. J’ai déjà pensé que rien ne pouvait égaler le bruit extravagant de la Fiat 500 Abarth, mais cette Ford y arrive. Elle est plus bruyante et moins artificielle à la fois — bravo.
L’authentique
En fait, plusieurs aspects de la Focus RS paraissent moins artificiels et plus authentiques. La direction, malgré son assistance électronique, procure une sensation franche et agréable (encore plus si vous avez de longs bras), l’action du levier de vitesses est parfaite (une boîte manuelle est votre seule option) et la transparence du rouage intégral rehausse le charme de la voiture.
Bon, c’est certain que plusieurs trouveront difficile de payer près de 50 000 $ pour une Focus, d’autant plus que la Volkswagen Golf R coûte moins cher, mais j’ai le sentiment que les lettres RS vont peser lourd dans la balance et que bien des amateurs seront prêts à dépenser une telle somme pour goûter à ce bon morceau de l’histoire automobile… surtout s’ils ont beaucoup de neige pour s’amuser.
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